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« Je ne suis pas un assassin » : Bernard Pallot, 78 ans, a été acquitté, mercredi 31 octobre, à Troyes où il était jugé depuis lundi pour l’assassinat de son épouse Suzanne, malade, qu’il reconnaît avoir étranglée, pour qu’elle ne souffre plus.
« Ce procès témoigne de l’insuffisance de la loi qui nous met dans des situations, nous les particuliers, difficiles », a exposé avec calme Bernard Pallot à l’issue du verdict. « Je ne suis pas tout seul dans ce cas, il faut absolument que la loi évolue. On est dans le pays des droits de l’homme, normalement », a ajouté ce retraité.
Le droit de mourir « est une liberté que nous n’avons pas encore », a poursuivi son avocat, Frédéric Verra. La cour « a fait savoir que les actes avaient été commis. C’est indiscutable. Mais qu’en revanche il y avait une excuse d’irresponsabilité, qui était la contrainte liée à la situation », a-t-il expliqué.
Le 11 octobre 2021, ce professeur en IUT à la retraite, au casier judiciaire vierge, injecte du cyanure dans la cuisse de son épouse, dont la vie n’était selon lui « plus supportable », pour la tuer, sans y parvenir. Alors, « dans l’improvisation », il s’empare d’un morceau de fil électrique dans le garage de leur domicile d’Isle-Aumont qu’il lui serre autour du cou pendant une vingtaine de minutes. « Cela paraît un peu sauvage comme méthode, mais je n’avais pas le choix », a-t-il dit lors de l’enquête.
À l’arrivée des gendarmes, l’ingénieur de formation déclare : « C’est moi qui ai tué ma femme. » Il affirme avoir agi « par amour » et « à sa demande » pour « éviter qu’elle souffre ».
Mais pour l’avocat général, Mickaël Le Nouy, cet assassinat, « présenté comme un geste d’amour, est un geste interdit par la loi » et « on ne peut pas s’arroger le droit de tuer ». Bernard Pallot, jugé devant la cour d’assises de l’Aube, « a agi de façon déterminée, froide et violente », avait estimé l’avocat général. Il avait requis huit ans de prison.
La défense avait fait citer Olivier Falorni, rapporteur général du projet de loi sur la fin de vie dont l’examen a été suspendu par la dissolution de l’Assemblée nationale, mais il ne s’est pas présenté, ne souhaitant pas « faire pression sur la cour », a regretté l’avocat de l’accusé.
Si l’euthanasie était légale, « Bernard Pallot n’aurait pas étranglé sa femme avec un fil électrique », a plaidé l’avocat.
Suzanne Pallot, également septuagénaire, souffrait de plusieurs pathologies, notamment de la maladie de Carrington, une pneumopathie chronique, et d’ostéoporose, avec des fractures multiples, dont une du col du fémur intervenue peu de temps avant les faits.
Lors d’un interrogatoire, Bernard Pallot a affirmé qu’il s’agissait pour lui d’une « euthanasie » demandée par son épouse, à laquelle il était marié depuis 1969. Près de son corps, un mot a été trouvé : « Je soussignée, Pallot Suzanne, encore saine d’esprit, demande à mon mari, Bernard Pallot, de me soulager définitivement des souffrances incurables que je supporte. »
Le retraité affirme mesurer la gravité de son acte « vis-à-vis des lois de la République », mais estime avoir « tenu ses promesses » vis-à-vis de son épouse. Selon lui, Suzanne, dont il s’occupait au quotidien, ne voulait pas retourner à l’hôpital où elle se sentait « mal entourée ».
À un ami, l’accusé dira : « En France on ne peut pas euthanasier les gens qui souffrent, mais on le fait pour les animaux. »
Dans le cadre de l’enquête, un expert psychologue a décrit une forme de soumission de l’époux à l’égard de sa femme, qu’il n’osait pas contredire ou raisonner. « Il a fait ce qu’elle voulait et pas ce qu’il voulait », a estimé un expert psychologue, mercredi.
Le jour de sa mort, Suzanne a dit adieu à son fils unique au téléphone. Devant le juge d’instruction, ce fils a déclaré que son père avait assassiné sa mère « par amour, par compassion ». « Je ne suis pas un assassin, si je suis condamné, on aura confondu l’amour et la haine », avait déclaré l’accusé avant que la cour se retire pour décider de son sort.
Le Monde avec AFP
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